« Ignorance est mère de tous maux! »

Sixty avait plaisir à découvrir, voire même redécouvrir Londres. Elle avait d’abord connu la ville au vingtième et au vingt-deuxième siècle, le vingt-et-unième lui était presque inconnu. Une des premières choses qu’elle eu envie de voir était le London Eye. « L'œil de Londres ou « la grande roue du millénaire » est une grande roue qui a été mise en place à Londres pour les festivités de l'an 2000 mais qui fut détruite lors d’une guerre au début du vingt-deuxième siècle. Sixty n’avait connu que les ruines de ce monument. Elle avait l’occasion de pouvoir contempler ce qu’on lui avait toujours décrit comme l’une des splendeurs de la ville. Apparemment, la roue comportait trente-deux nacelles, climatisées et fermées. Chaque nacelle pouvait embarquer environ vingt-cinq personnes. La rotation complète durait environ 30 minutes. La jeune fille était fascinée par tant d’ingéniosité de la part des constructeurs. Tout sourire, elle se rapprocha du guichet pour faire un tour dans cette roue magnifique. En route pour une nacelle, elle fut stoppée par une sorte de garde.

« Mademoiselle, vous devez d’abord prendre un ticket ! C’est dix sept livre sterling et cinquante pence. »

Surprise, Sixty fut vite reconduite à la sortie. Elle se contenta de jeter un regard noir à celui qu’elle considérait maintenant comme un vilain bonhomme. Elle avait beau avoir plus de quatre cent ans, elle était l’équivalent d’une jeune femme d’une vingtaine d’année chez les terriens. Très vite, elle repéra un distributeur de monnaie et s’y précipita. Examinant la machine, cela ne ressemblait en rien à tous ceux qu’elle connaissait, cependant la présence du symbole du live sterling apparaissant, cela ne pouvait qu’être un distributeur. Comme encastré dans un mur, il y avait toute fois une sorte d’écran. Il n’y avait pas de mode d’emplois, mais elle remarqua un nom sur la machine : HSBC.

« Bonjour Sir Holdings HSBC. Mon identifiant bancaire est le 1991 1231 5717 33 et je voudrais disposer de £17.50. »

Bien sûr, il ne passa rien ! Derrière elle, plusieurs personnes commençaient à s’impatienter, eux aussi souhaiter utiliser la machine apparemment ; Puis Sixty réalisa que son identifiant bancaire n’existait pas encore vu qu’elle l’avait créé au vingt-deuxième siècle. Elle rigola bêtement et s’excusa auprès de la machine.

« Oh pardon ! Vous ne risquez pas comprendre… Pas pour l’instant ! Je m’appelle Sixty mais mon nom d’usage est Susan Foreman. Je dois être dans les archives de mille neuf soixante trois ! Je voudrais £17.50 s’il vous plait ! »

Toujours rien… Sixty perdait patience. La machine ne répondait pas et ne prenait même pas la peine d’expliquer son refus de lui donner de l’argent. Visiblement, les gens derrière elle aussi perdait patience. Elle se retourna et demanda de l’aide au jeune homme derrière elle.

« Bonjour ! Vous voulez bien demandez à cette idiote de machine pourquoi elle refuse de me servir ? »

« Ignorance est mère de tous maux! »

Alors que le jeune homme que Sixty avait interpellé tentait tant bien que mal de lui expliquer le fonctionnement de la machine bancaire, elle lui prêtait une oreille attentive. Toutefois, il portait un parfum qui était familier à la demoiselle qui avait un odorat très développé, mais elle était trop intriguée par la machine pour y prêter plus attention. Contrariée par le fait que la machine marche par carte et qu’elle n’en possède pas, elle murmura son mécontentement directement au distributeur !

« Une carte ? T’es pas capable de reconnaitre mes empreintes rétiniennes ou de faire une reconnaissance vocale mais t’arrive à lire une petite carte ? Tu te moques de moi, c’est ça ? » »

Sixty prêta cette fois attention au jeune homme. Il était plutôt grand et assez maigrichon, le ton pâle mais quelques légères traces de tâches de rousseurs peu visible. De grands yeux très expressifs entourés de jolies pattes d’oies et des lèvres pincées. Ce qui étonna le plus Sixty, c’était son parfum mais elle n’arrivait pas à se rappeler où elle l’avait déjà sentie.

« Vous portez du parfum ? » La puissance de l’odorat de Sixty était tel qu’elle ne savait pas vraiment s’il s’agissait vraiment d’un parfum ou bien de résidu de particule odorante… « Oubliez le parfum, ça doit être dans l’air ! » Reprenant sa concentration sur la fameuse carte, elle revint au sujet initial,

« Je n’ai pas de carte, vous pouvez me prêtez la votre ? »

Sixty n'avait aucune idée de comment se procurer une carte permettant de faire marcher la machine. Elle voulait juste visiter le London Eye pour le moment et le jeune homme en ayant une en état de marche, sans doute pouvait-il dépanner Sixty. Il lui inspirait confiance et semblait très gentil en plus d'être sympathique.

« Ignorance est mère de tous maux! »

Encore une fois, Sixty était un peu décontenancée devant les explications du jeune homme… Apparemment, il ne pouvait pas lui prêter sa carte et il lui conseiller d’aller ouvrir un compte à la banque. La demoiselle n’y voyait pas l’utilité puisque elle y possédait déjà un compte. L’un ouvert dans les années soixante et l’autre au XXII° siècle. D’autant plus que dans ses souvenirs, lors de l’ouverture de son second compte, on lui avait signalé que le premier était toujours dans les dossiers. Donc, si au vingt-deuxième siècle, on avait pu trouver trace de son compte, pourquoi pas au vingt-et-unième ?

« Ce serait trop long d’aller encore ouvrir un troisième compte à la banque… En plus, je ne veux pas risquer de créer un paradoxe vu que le second deviendrait le troisième ! »

Autant limiter les dégâts, elle avait déjà pris pas mal de risque en se jetant volontairement dans une faille temporelle… Et puis, si la faille l’avait amené à cette époque, c’est que quelque chose d’important aller se produire. Et ce n’était certainement pas quelque chose de très positif. Quelques de choses de graves qu’elle était malheureusement incapable de prévoir… Tout en regardant le jeune homme, si gentil avec elle, elle se demanda comment lui rendre la pareille.

« Je veux bien accepter votre proposition, il me faudrait dix sept livre sterling et cinquante pence. »

Elle fouilla ses poches et en sortie une sorte de gri-gri munie de deux petites plumes rose au reflet argenté,

« Tenez, c’est pour vous remercier de m’aider ! Ca vous portera chance en cas de besoin… »

« Ignorance est mère de tous maux! »

Le jeune homme lui arracha un sourire lorsqu'il demanda sur le ton de la plaisanterie qu'il se demandait si elle venait d'une autre planète. Sixty ne pu retenir un petit rire amusée. La perspicacité des humains était surprenante mais la demoiselle s'amusait toujours de voir que leur logique prenait toujours le pas sur l'intuition. Alors qu’elle venait de remercier le jeune homme en lui offrant un gri-gri, il lui offrit à son tour, le plus beau des cadeaux : l’espoir ! Une seule et simple question, anodine mais pourtant pas tant que ça… « Le Docteur ».

Est-ce qu’elle connaissait celui qu’on appelle « le Docteur ». Sixty, à force de déception, préféra cependant ne pas trop y croire. Mais c’était sans compter sur sa spontanéité légendaire qu’elle décida d’allier à la prudence, mère de sûreté. Après tout, le jeune homme pouvait potentiellement être en train de parler d’un simple et commun docteur en médecine.

« Un vieil homme aux cheveux gris, à mi chemin entre le Magicien d'Oz et le Père Noel, qui ne sépare que rarement de sa canne et sa pipe à tabac ? »

Sixty ne pouvait pas oublier le portrait de son grand-père, mais sans doute oubliait-elle un détail : la régénération ! Depuis le temps, il était fort à parier qu’il avait dû se régénérer plusieurs fois et donc, plus communément : changer d’apparence. Penser à son grand-père aida Sixty à se rappeler ce qu’étais le parfum du jeune homme : le mercure, le minerai rare Zeiton 7 mais un composant lui échapper toujours… Le fait est que le Zeiton 7 était le minerai des plus recherché mais aussi la marchandise préférée des escrocs Varosians. Prise d’un doute sur le si gentil jeune homme, elle recula d’un pas et glissa ses mains dans ses poches. Après tout, il avait, quelques instants auparavant faire allusion au fait qu'elle venait d'une autre planète... Plaisanterie ou véritable information qu'il détenait?

« Pourquoi vous me demandez ça ? » demanda t-elle avec le ton le plus ingénue dont elle était capable.

Après tout, les chances pour que le premier homme avec qui Sixty discute, connaisse en fait le Docteur pouvait être suspect. Dans son souvenir, son grand-père se montrait quelque peu méfiant des humains, mais sans doute avait-il changé… Il a eu près d’un siècle pour ça. Bien-sûr le jeune homme ne semblait pas être une menace, mais bon, il parait qu’on est jamais trop prudent !