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L'Histoire. La si passionnante et éternelle Histoire. Pour certains, pour les pauvres ignorants plus précisément, celle-ci est comme totalement écrite dans le marbre, incapable de tout changement significatif. Mais pour ceux qui "savaient", celle-ci était constamment en mouvement, aussi vivante que l'être en lui-même. Il était donc normal que posséder une part d'Histoire, même une toute petite, soit rentable. A vrai dire, il s'agissait sans doutes du secteur le plus rentable possible. Inégal certes mais il était tellement ennuyeux de vivre par les règles établies que les transgresser ne pouvait être que particulièrement excitant. Et puis il n'y avait pas mort d'homme alors pourquoi stopper mes si passionnantes activités ?Aussi mettais-je constamment un point d'honneur à satisfaire les attentes, même les plus particulières, de clients dont l'identité m'était souvent inconnue. Mais à vrai dire, tant que j'étais payée, tout allait bien dans le meilleur des monde. Pas de questions, juste des actes. Parfait. Mon client du jour ?Un riche industriel de la City amateur "d'antiquités" asiatiques. Du moins était-ce tout ce que son intermédiaire avait daigné m'informer aussi aimablement qu'un bouledogue accroché à la jambe d'un facteur imprudent. Du genre que je détestais en vu d'un tel manque de politesse mais malgré cela, qui étais-je pour juger ?D'autant plus que j'appréciais le désir d'initiative demandé par mon client qui m'avait ainsi laissée toute opportunité de le surprendre. Un sabre chinois de la dynastie Shang, n'était-ce pas parfait ?Ce qu'il sembla être, étant donné l'admiration manifeste de l'intermédiaire lors de son examen. Mes affaires rapidement terminées et un chèque conséquent bien au chaud dans ma poche, je rejoignis le National Muséum tout proche pour prendre le temps d'admirer toutes ces merveilleuses merveilles enfermées sous les nombreuses glaces, capable de juger leur prix rien qu'en les regardant. C'était ça le talent que tout voleur un tant soit peu doué se devait de posséder: l'estimation de ses potentiels futurs larcins rien qu'au regard. Même si pour le moment, j'étais suffisamment satisfaite de moi pour ne pas "professionnellement" m'intéresser à nombre de ces belles choses. Aussi considérais-je ces instants comme une pure détente, principalement dans la section Romaine du musée. Pour une raison que j'ignorais, la plupart de mes clients avait une véritable fascination pour cette époque, ce qui était loin de me déplaire étant donné qu'une majeure partie de mes forts "salaires" venaient d'eux. Et tant que mes efforts étaient récompensés à leur hauteur, je ne voyais aucune raison de m'arrêter. Écouteurs dans les oreilles, fredonnant Staying Alive des Bee Gees (j'adorais cette chanson, qui symbolisait parfaitement une philosophie de vie), je me berçais de l'Histoire qui m'entourait toute entière.